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Tout ça pour un ballon !

Le référentiel bondissant n’était pas aléatoire mais il représentait, malgré tout, un danger pour les séparateurs vitrifiés. On ne pouvait s’en servir, dans l’espace interstitiel de liberté, qu'en faisant bien attention de ne rien casser, et seulement quand l'inducteur de métacognition l’autorisait.

Bientôt c’était la fin du temps réglementaire de solidarité. Les enfants du cours d'introduction à la vie scolaire entraient en rang par deux dans leur espace référentiel d'encadrement. Ils apprenaient la motricité sémantique appliquée en faisant glisser, d’une extrémité préhensile souple, leur lame métallique gorgée de préparation couvrante sur du broyat de chiffons quadrillé, tout en veillant à respecter l'espace réservé latéral gauche. Les géniteurs d'apprenants n’en attendaient pas moins de l’école. Ils ne voulaient pas être affublés de continuateurs patrimoniaux dont tout le monde saurait qu'ils étaient en état de fragilité pédagogique, et dont les zones d'ignorance seraient contreproductives. Ils tenaient à la réputation de leur unité socio-matrimoniale. Hélas, de nombreux apprenants en déficit de motivation, malgré les recommandations les plus farouches, se mettaient régulièrement en phase de repos intentionnel. Leur inappétence globale pour le savoir et leur caractère réfractaire à toute dépense intempestive d'énergie en étaient les causes principales. Ils savaient tirer le meilleur parti de leur minimalisme neuronal. On ne trouvait chez eux nulle trace, virtuelle ou concrète, d'affinité didactique et l’on pouvait affirmer sans crainte que le principe d'acquisition des connaissances était contraire à leur capital notionnel de base. Du même coup, leur écart de progression s’en trouvait substantiellement extensible. Ils avaient en particulier une conscience métalinguistique faible et une hostilité marquée envers les élèves intensément créatifs.

Leurs connexions cérébrales étaient pauvrement investies mais, malgré tout, leur processus de réflexion était accessible au principe de déblocage accéléré si on savait induire chez eux un enthousiasme graduellement normalisé. Leurs possibilités étaient voisines du degré zéro de l'entendement mais une vague lueur oculomentale indiquait chez certains un éveil possible si on parvenait à jeter une étincelle de parole dans le désert de leur inaction. Ils ne pouvaient que mieux faire, à condition, certes, que le contexte dialectique s'y prêtât et que les lacunes qui leur tenaient lieu de capacités mentales s'estompassent de façon radicalement exponentielle. Vu les prémisses infraliminales de leur entendement ils ne pouvaient prétendre au passage dans l’unité pédagogique d'incrémentation qu’en ouvrant régulièrement, avec la curiosité d’un primate musophile devant un miroir, leur matériel typographique de connaissances et en redoublant, sans manifestation entropique démesurée, leurs renforcements énergétiques programmables. Ils étaient parfois victimes d’un ralentissement circadien de leur cycle de vigilance qui les poussait à caler leur horloge biologique sur l'heure estivale de l'hémisphère sud. Leur manque d'accomplissement responsable les amenait à avoir des attitudes peu propices à l'orthodromie. Leur sens inné du décalage rhétorique grimaçant les conduisait à détourner du droit chemin intellectuel leurs analogues co-scolarisés et à corrompre l’unité des groupes d’attention sans se soucier de l'organisation scolaire imposée. Ils étaient tentés d'occuper un point de vue élevé et panoramique, ce qui leur permettait de surveiller l’ensemble d’apprenants sans problème. Leurs motivations compulsives à opérer des déplacements multicentriques impromptus venaient du plaisir qu’ils avaient à provoquer une pénurie générale d’attention. Il leur arrivait parfois de se livrer à des actes d'accaparement cumulatif proximal, qu'ils faisaient ensuite semblant de regretter dès qu'ils sentaient l'imminence d'une déclaration potentiellement critique ou d'une tâche impérative de réparation de la part de leur inducteur pédagogique. Ils craignaient de se retrouver en état d’isolement réflexif prolongé. Ils évitaient en outre d’être l’objet d’une impopularité collective déclarée qui les guettait quand ils allaient trop loin.

Ils faisaient preuve d’une organisation aléatoire de leur potentiel noétique à chaque fois qu'ils devaient opérer une restitution orale de connaissance ou se livrer à un travail prérequis. Bien sûr ils étaient tentés de se mettre en état de compétence hyperdocumentée mais ils se retenaient car ils avaient une défiance anticipatrice majeure de recevoir l'ordre de se changer en bissectrice angulo-murale. Ils étaient prêts à tout subir, depuis le discours hétéro-référentiel jusqu’à la mission d'allégeance disciplinaire chez le conseiller principal d’éducation et à la menace d’une attribution compensatoire négative au test évaluatif de fin d'études. C’était une époque où la pratique de l’extension postéro-itérative du pied était encore permise et plus efficace que la rélégation en unité de promotion différée ou la convocation des auxiliaires biologiques d'éducation pour information circonstanciée et éventuellement le raccompagnement unilatéral définitif.

Bref, ils étaient en état de viduité intellectuelle décompensée, avec une inclination au défaut de construction logique et à l'incompétence en matière d’action planifiée. Ils se moquaient des sollicitations éducatives répétées et se sentaient non concernés par la projection antérograde personnelle. Leur marge d'évaluation compensée était si réduite qu’ils prétendaient ne pas être intéressés par son comblement. Leur seul avantage était qu'ils n’agissaient pas en opposants systématiques pendant les heures d’activité polymusculaire rythmée ou les conférences d'académie picturale. A part ça, ils faisaient tout pour conserver un niveau isométrique de formation. Au bout de quelques années ils finissaient par sortir de l’encadrement éducatif structuré sans la moindre attestation de réussite scolaire.

C’est pourquoi les séances de liberté aérée collective avaient tant d’importance pour eux et qu’ils y étaient si habiles à manier avec adresse le référentiel bondissant.

La traduction ?

Le ballon n’était pas un ballon de rugby mais il représentait, malgré tout, un danger pour les fenêtres. On ne pouvait s’en servir, dans la cour de récréation, qu'en faisant bien attention de ne rien casser, et seulement quand le professeur l’autorisait.

Bientôt c’était la fin de la récréation. Les enfants du cours préparatoire entraient en rang par deux dans leur classe. Ils apprenaient à écrire en faisant glisser, d’une main souple, leur plume gorgée d'encre sur du papier quadrillé, tout en veillant à respecter la marge. Les parents d'élèves n’en attendaient pas moins de l’école. Ils ne voulaient pas être affublés d'enfants dont tout le monde saurait qu'ils étaient des cancres, et dont les carences notoires seraient impossibles à rattraper. Ils tenaient à la réputation de leur famille. Hélas, de nombreux élèves médiocres, malgré les recommandations les plus farouches, avaient une fâcheuse tendance à ne rien faire. Leur indifférence et leur manque d'intérêt pour l'effort en étaient les causes principales. Ils savaient tirer le meilleur parti de leur paresse. On ne trouvait chez eux nulle trace, virtuelle ou concrète, de participation à la vie scolaire et l’on pouvait affirmer sans crainte qu'ils n'étaient pas faits pour l'école. Du même coup, ils avaient tout à apprendre. Ils avaient en particulier de mauvais résultats en grammaire et une hostilité marquée envers les surdoués.

Ils étaient inintelligents mais, malgré tout, on pouvait les stimuler si on savait les motiver. Ils avaient peu de chance de développer leur intelligence mais un je-ne-sais-quoi dans leur regard indiquait chez certains un éveil possible si on parvenait à les encourager. Ils ne pouvaient que mieux faire, à condition, certes, que la relation maître-élève fût bonne et que les signes prouvant qu'ils étaient ignares s'estompassent de façon spectaculaire. Vu leur niveau basique ils ne pouvaient prétendre au passage dans la classe supérieure qu’en ouvrant régulièrement, avec la curiosité d’un singe devant un miroir, leurs livres de classe et en redoublant, sans rechigner, leurs efforts. Ils étaient parfois victimes d’un retard de sommeil qui les poussait à prendre le jour pour la nuit. Leur manque de maturité les amenait à avoir des attitudes déviantes. Leur sens inné de la plaisanterie les conduisait à faire rire leurs camarades et à perturber les cours sans se soucier de la discipline. Ils étaient tentés de monter sur les tables, ce qui leur permettait de surveiller toute la classe sans problème. Leurs motivations compulsives à courir en tous sens venaient du plaisir qu’ils avaient à distraire tout le monde. Il leur arrivait parfois de commettre des larcins aux dépens de leurs voisins, qu'ils faisaient ensuite semblant de regretter dès qu'ils sentaient l'imminence d'une admonestation ou d'une punition de la part de leur enseignant. Ils craignaient de recevoir 3 heures de colle. Ils évitaient en outre d’être l’objet d’une mise en quarantaine qui les guettait quand ils allaient trop loin.

Ils faisaient preuve de trous de mémoire à chaque fois qu'ils devaient réciter une leçon ou faire un devoir. Bien sûr ils étaient tentés de tricher mais ils se retenaient car ils avaient peur de recevoir l'ordre d'aller au coin. Ils étaient prêts à tout subir, depuis la comparaison avec les petits camarades jusqu’à l'envoi chez le surveillant général et à la menace d’une note éliminatoire au baccalauréat. C’était une époque où la série de coups de pied au derrière était encore permise et plus efficace que la relégation en classe de transition ou la convocation des parents pour information circonstanciée et éventuellement la mise à la porte.

Bref, ils étaient nuls, avec une inclination à la bêtise et au farniente. Ils se moquaient des tentatives pour les instruire et se moquaient totalement de leur avenir. Leur moyenne générale était si basse qu’ils prétendaient ne pas être intéressés par les cours de rattrapage. Leur seul avantage était qu'ils ne perturbaient pas la classe pendant les cours de gymnastique ou les leçons de dessin. A part ça, ils faisaient tout pour redoubler. Au bout de quelques années ils finissaient par sortir de l'enseignement sans le moindre diplôme.

C’est pourquoi les séances de plein air avaient tant d’importance pour eux et qu’ils y étaient si habiles à manier avec adresse le ballon.

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